L’entreprise à mission dans le monde : état des lieux

20 février 2018

Le 13 février dernier, le 3 rue du Louvre avait le plaisir de recevoir Geneviève Ferone-Creuzet, co-fondatrice du cabinet Prophil, conseil en stratégie dédié à la convergence des modèles philanthropiques et économiques, qui a publié un panorama international des statuts hybrides d’entreprise au service du bien commun et a mené une enquête auprès des dirigeants d’entreprise sur leur perception de l’entreprise à mission.

LES ENTREPRISES A MISSION : DE QUOI S’AGIT-IL ?

Depuis le lancement par le gouvernement des travaux sur le Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation de l’Entreprise (PACTE), l’entreprise à mission est au cœur des débats en France. Mais de quoi s’agit-il exactement ?

Les entreprises à mission sont celles qui font le choix de la création de valeur partagée. Ce sont des entreprises qui au lieu de chercher à être « les meilleures du monde, cherchent à être les meilleures pour le monde »,selon la devise du label « Benefit Corporation ».

Pour G.Ferone, ces entreprises se perçoiventcomme une force de transformation de la société et prennent statutairement l’engagement d’apporter leur contribution aux enjeux économiques, sociaux, environnementaux de la société dans laquelle opèrent.

Cette notion challenge le statut juridique :« l’entreprise définit un objet social élargi à des sujets sociaux et/ou environnementaux. Elle l’inscrit dans ses statuts pour le rendre opposable à ses différentes parties prenantes »,peut-on lire en introduction dans le guide des entreprises à mission publié par Prophil. De nouvelles formes juridiques ont ainsi émergé un peu partout dans le monde depuis près de 10 ans.

DES ENTREPRISES A MISSION DANS LE MONDE ENTIER

Le panorama international dressé par Prophil témoigne que cette réflexion n’est pas isolée : des États-Unis, à l’Italie, en passant par le Canada ou le Royaume-Uni, de nouveaux statuts d’entreprise à mission sont apparus.

Trois pays ont créé un statut dédié aux entreprises à mission (les Etats-Unis dont Hawaii, Porto Rico, l’Italie) et neuf étudient actuellement une proposition de loi (l’Australie, l’Argentine, le Chili, la  Colombie, le Canada, le Brésil, le Pérou, le Royaume-Uni, la France). Il existe plus de 2 000 « Benefit Corporations » aux Etats-Unis et plus de 1 000 « Public Benefit Corporations », 140 « Società Benefit » en Italie et 7 entreprises françaises expérimentent la société à objet social étendu (SOSE). Une seule entreprise à mission américaine est cotée en bourse (Laureate Education).

Patagonia, entreprise familiale américaine, première Benefit Corporation du Maryland, se donne comme mission de« fabriquer des produits de qualité en ayant le moins d’impact possible sur l’environnement, et encourager le monde de l’entreprise à mettre en place des solutions pour enrayer la crise environnementale ».

La Camif, une des premières entreprises françaises à s’inscrire dans cette démarche, souhaite« être une éco-entreprise qui développe la consommation responsable et la production locale ».

UN SUJET DE DÉBAT EN FRANCE

Illustrations réalisées par Olivier Ménégol, pour Prophil – Tous droits réservés

D’après l’enquête menée par Prophil, 15% des dirigeants français remplissent déjà les critères de l’entreprise à mission et 68 % souhaitent, à ce titre, la création d’un cadre juridique dédié.

De nombreuses voix se sont élevée pour modifier l’article 1833 du code civil – datant du début du XIXème siècle – qui définit que« toute société doit avoir un objet licite et être constituée dans l’intérêt commun des associés »,ce qui restreint la création de valeur au profit et n’adresse pas les autres parties prenantes.

D’autres appellent de leurs vœux la création d’un nouveau statut hybride d’entreprise à mission en France

Au-delà de ces questions juridiques, le sujet a ouvert à un débat passionnant auquel participent dirigeants, salariés, organisations professionnelles, économistes, conseils, universitaires, médias sur la place de l’entreprise dans le monde du XXième siècle et sa contribution aux grands enjeux de société.

Notre rôle en tant que consultant sera d’accompagner les nécessaires changements de « mind set », de gouvernance et de pratiques qui découleront des décisions qui devraient être prises mi 2018 et donneront un nouveau cadre.